L’auto-compassion

Toute la pratique de la mindfulness est imprégnée de compassion et de bienveillance. Un des besoins les plus fondamentaux de toute personne est d’être reconnue, vue pour qui elle est, sans jugement, sans le filtre du conditionnement de l’autre (ses idées reçues, préconçues, ses croyances et ses attentes). C’est d’être accueillie avec une intention bienveillante, un esprit neuf, ouvert et généreux, où il y a de la place pour tout ce que nous sommes et non pas seulement une partie de nous-même qui serait comme une caricature. Nous aimerions être reçus avec confiance et patience, sentant que l’autre n’a pas le projet de nous éloigner de nous-même.

On pourrait dire la même chose pour notre attitude envers nous-même, surtout lorsque notre paysage intérieur est sombre, lourd, hostile. Avoir cet accueil pour nous-même est un acte de compassion profond et apaisant. Le pouvoir de l’auto-compassion est en effet immense. Il ne s’agit pas de nous apitoyer sur notre sort, de sombrer dans le rôle de victime ou de nous satisfaire à rester bloqué dans des habitudes et croyances qui nous limitent ou même qui font du mal à nous-même et aux autres. Il s’agit d’un acte très volontaire et parfois courageux de nous voir et de nous accueillir comme nous sommes, avec toutes nos qualités, nos forces, notre vulnérabilité, nos erreurs …, de nous autoriser à ressentir ce que nous ressentons et d’être imparfait et faillible, étant donné que nous sommes humains, tout d’abord.

Dans son beau et poignant poème « La Gentillesse » (dont le titre original en anglais est « Kindness »), Naomi Shihab Hye nous signifie à quel point « la terre peut être désolée entre les régions de la gentillesse ». Elle nous rappelle par ses images qu’il faut avoir eu le courage de reconnaître et d’accueillir nos blessures pour que notre cœur puisse s’ouvrir … mais que sans la gentillesse, le paysage reste morne, lugubre. Sans la gentillesse et la bienveillance, nous avons besoin de nous protéger là où ça fait mal.

Enfin, sans la gentillesse, l’accueil chaleureux et le pardon, nous risquons de rester emprisonnés derrière les murs gris et froids de notre déni – le déni soit de notre vulnérabilité et nos peurs, soit de notre force et nos qualités – et par extension celles des autres.